J56 : Le point de cassure @ Melbourne -> Torquay /VIC 12980Km (09/12)

Quand je rentre dans la maison de Preston au réveil , je ne croise encore personne.
Je prend ma douche et file directement à Saint Kilda pour me prendre un café face à l’océan.
Je met une petite heure pour y arriver.
Heure de pointe du lundi matin.
Val avait raison , c’est vraiment une étape inutile.
Je me prend un cappuccino à emporter pour boire face à la mer.
Ce n’est même pas très beau.
Je bois mon mug cul sec et je reprend le volant.
Aujourd’hui c’est un jour important pour moi , je vais en pèlerinage.
Je me rend à Torquay , la ville par où commence la Great Ocean Road et surtout pour aller fouler sable de la légendaire Bells beach.

Il est 11h , ce n’est pas très loin mais j’ai décidé de prendre mon temps pour cette dernière semaine de voyage.
Je croise l’enseigne d’un Intersport peu de temps avant d’arriver , dans lequel je trouve mon maillot des Stars de Melbourne.


Une heure plus tard , peu avant 16h , j’arrive à Torquay et je prend directement la direction de Bells beach.
Nous y voilà...



Une plage , d’accord , mais pourquoi un pèlerinage? Te demandes tu cher journal.
Assis toi confortablement dans ton fauteuil et écoute moi.

Pour commencer , dans cette partie du littoral , on surfe vraiment.
Ce n’est pas comme à Airlie beach ou Bondi , ou l’on surfe le dimanche après le gigot de kangourou de belle maman.
C’est ici qu’a été importé le surf d’Hawaï en Australie environ peu de temps après la première guerre mondiale.
C’est ici que le Surf a pris son essor mondial.
Doug Warbrick et Brian Singer y créèrent la marque Rip Curl en 1969.
À la base ils ne fabriquaient que des planches , mais au fur et mesure ils se sont étendus aux combinaisons et aux vêtements.
Le siège social est encore à Torquay , qui est vraiment un petit bled.
C’est ici aussi qu’en 1973 , a été créé la première compétition professionnelle avec de l’argent à la clé.
A l’époque ça avait créé des remous car le surf c’est plus une philosophie de vie , qu’un sport de compétition .
Depuis cette année, Bells beach est une étape très reconnue au WSL (world surf league)

Mais pourquoi cet engouement pour ce sport de glisse? Pourquoi un pèlerinage?

J’y venais.

Durant mon adolescence , il y a 2 sports que j’ai suivi.
Le premier étant le basket-ball , plus particulièrement le championnat de NBA.
Je regardais les matchs , je collectionnais les cartes.
Je voulais même le pratiquer en club , même si je n’étais pas très bon.
J’envoyais des signaux à mes parents en collant des posters.
J’avais Michael Jordan sur ma porte de chambre en taille réelle et aussi le poster de la Reebok Shaq attack de Shaquille O’Neal en taille réelle .
Il chausse du 56 1/2 le bougre.
Mes parents en avaient décidé autrement , je ferais du water-polo.
Ils devaient voir en moi un petit saumon prêt à tout pour remonter des courants.
Je n’ai pourtant  jamais eu de poster de water-polo dans ma chambre.

Pour le deuxième sport , c’est arrivé au lycée, en seconde.
J’ai du changer de ville , j’ai du aller à Gagny au lycée Gustave Eiffel qui avait meilleure presse que le lycée Olympe de Gouges de Noisy-le-sec.
Gagny est une ville de Seine Saint Denis mais beaucoup plus bourgeoise que Noisy , même si elle est frontalière avec la cité des Bosquets de Montfermeil.
J’y rencontre d’autres personnes , dont Cédric Gaillard , qui deviendra mon bff de seconde.
Cédric habite Gagny , il est issu d’une famille aisée, il habite dans un grand pavillon avec jardin.
À Noisy j’étais dans une petite cité , on trainait entre potes.
Il était rare de trainer avec des gens qui habitaient en pav.

Avec Cédric donc on s’aperçoit vite qu’on partage la même passion pour le rock.
La chemise à carreaux sur le t shirt Kurt Cobain chaussé d’une paire de doc Marten’s ne trompe pas.
On s’entend très vite.
Je passe beaucoup de mes mercredis après-midi chez lui.
C’est un des premiers à avoir internet , on drague sur le chat d’aol en écoutant du rock.
Cédric a un garage où il a une batterie.
À l’époque je faisais du saxophone , je n’étais pas assez mature musicalement pour me dire que cet instrument aurait bien sa place dans un groupe de rock.
Avec Cedric à la batterie, Anthony Machado à la guitare et moi au chant , on décide de monter notre groupe.
INFERNAL
La seule cover qu’on maîtrisait c’était Rape Me de Nirvana.
Je pense que je manquais un peu de Cobain cred’
Coupe au gel , voix qui mue et bagues aux dents.
Je n’avais de Kurt , que la chemise de lumberjack à carreaux rouge et noir.
Même les filles qui venaient nous voir faisaient semblant de nous faire croire qu’on était bon.

Quand on ne faisait pas de rock , on s’essayait au skate.
Cédric en faisait depuis quelques temps , ma grand mère m’a payé une planche pour Noël.
Dans sa zone pavillonnaire c’était parfait pour exercer.
Bon je n’étais pas très bon non plus, mais au moins j’essayais.
Cédric allait tous les étés au Cap Ferret.
Ses parents avaient aussi une maison là bas.
Il s’essayait au bodyboard avant d’attaquer le surf.
Dans sa chambre , il avait plein de photos de surf collées au mur.
Ça venait d’un magazine qui s’appelle Surf Session.
Un mensuel qui traite de l’actualité du surf de manière plutôt qualitative.
Je veux faire comme mon bff.
Du coup une fois par mois , ma mère revenait avec sa cartouche de Chesterfield , Téléstar et Surf Session.
Je commençais à coller des photos de partout dans ma chambre et sur mes cahiers.
Je me prend de passion pour ce sport et suis son actu.
À l’époque c’est Kelly Slater le patron.
Je rêve d’essayer de faire du surf mais malheureusement pour moi (problèmes de riches)
Je pars en vacances chaque été dans l’Ain chez mes grand parents et sur la côte d’azur avec mes parents ( pas assez de vagues).
Au printemps de ma seconde , on voit apparaître avec Cedric dans notre journal favori qu’une école de shaper vient d’ouvrir à Biarritz.
Le shaper est celui qui designe et construit les planches de surf.
On a très envie de faire ça (on a 15 ans).
Peu après Roland Garros (la quasi fin de l’année scolaire) je prend mon courage à deux mains et demande à mon père si je peux aller faire cette formation l’année prochaine.
Il me répond d’un sobre mais néanmoins efficace, NON.
Je redoublerai ma seconde.

Quand on devient fan de surf , on se doit d’avoir un film culte...
Avec Cédric nous en avions un et pas des moindres.
Cher journal , c’est sur cette plage , ici à Bells beach que tout se finit.
C’est ici que le fougueux Johnny Utah enlève les menottes du téméraire Bodhi pour le laisser surfer la vague des 50 ans.
Il ne reviendra pas.


Bon ok , ça à l’air un peu débile comme ça , mais on a tous notre film de Pat Swayze préféré.
Pour certains c’est Ghost , pour d’autres ça peut être Roadhouse.
Je sais que pour toi , journal , c!est Dirty dancing.
Marcher sur cette plage c’est comme aller dans la salle de bal où bébé sort de son coin pour le porté.
Il fait froid , mais je me baigne quand même dans cette plage pas recommandée à la baignade.


En séchant j’essaye de me refaire la final scene.

C’est ici qu’ils se tenaient face à l’océan.


Et c’est par cet escalier que les flics arrivent et que l’agent Utah repart.


Je tente une imitation de Bodhi attendant la vague des 50 ans.


La peur engendre l’hésitation , et l’hésitation engendre ce pourquoi tu avais peur.

Je quitte la Bells avec un sentiment de fait accompli.
Je trouve un super camping pas très loin d’ici et me fait un petit apéro pour fêter ça!


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